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Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
« Reconnaître notre ignorance est le commencement de la sagesse ». Cette maxime socratique est d’une importance fondamentale pour qui veut comprendre la société
Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
On pourrait dire que la civilisation commence lorsque l’individu, dans la poursuite de ses objectifs, peut faire usage de plus de savoir qu’il n’en a acquis par lui-même, et qu’il peut 1 franchir largement les frontières de son ignorance, en profitant de connaissances qu’il ne possède pas .
Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
Ce fait fondamental de l’inéluctable ignorance humaine quant à ces nombreuses réalités qui assurent le fonctionnement de la civilisation, n’a guère retenu l’attention. Les philosophes et ceux qui étudient la société ont généralement évité le sujet, et traité cette ignorance comme une imperfection mineure qu’on pourrait plus ou moins négliger
Note
Comment négliger l’ignorance quand on sait que l’asymétrie d’information est à la base de l’organisation pyramidale de la société ?
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. Si nous voulons comprendre comment fonctionne la société, il nous faut tenter de définir la nature générale et l’étendue de notre ignorance à cet égard. Bien que nous ne puissions pas voir dans l’obscurité, nous devons être capables de circonscrire les zones obscures.
Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
C’est une conception totalement fausse, que de représenter l’homme pourvu d’emblée d’un esprit capable de concevoir la civilisation, et se mettant à la créer. L’homme n’a pas imposé au monde, en toute simplicité, un schéma créé par son esprit. Son esprit même est un système qui change constamment au fil de son effort pour s’adapter à ce qui l’entoure. Ce serait une erreur de croire que, pour réaliser une civilisation supérieure, il nous suffirait de mettre en application les idées qui nous guident présentement. Pour pouvoir progresser, il nous faut laisser du champ à une révision continuelle de nos conceptions et idéaux d’aujourd’hui en fonction de l’expérience à venir. Nous ne sommes pas plus capables de concevoir ce que la civilisation sera, ou pourra être, dans cinq cents ans, voire cinquante – que nos ancêtres du Moyen Âge, et 2 même nos grands-parents, n’étaient capables de prévoir le monde d’aujourd’hui . L’idée que l’homme ait pu bâtir délibérément sa civilisation est issue d’un intellectualisme erroné, qui voit la raison dressée à côté de la nature et possédant un savoir et une capacité de raisonnement indépendants de l’expérience.
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Mais la croissance de l’esprit fait partie de celle de la civilisation ; c’est l’état de civilisation existant au moment considéré qui détermine le champ de vision et les possibilités de succès des fins et valeurs humaines. L’esprit ne peut jamais prévoir son propre progrès. Bien qu’il nous faille toujours lutter pour atteindre nos objectifs momentanés, nous devons aussi faire la part des nouvelles expériences et des événements futurs qui détermineront en fin de compte quels seront les objectifs atteints.
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Il est peut-être exagéré d’affirmer, comme l’a fait un anthropologiste moderne, que « ce n’est pas l’homme qui domine la culture, mais l’inverse » ; mais c’est un utile rappel qu’il nous adresse en écrivant que « c’est seulement notre profonde et vaste ignorance de la nature de la culture, qui nous permet de croire 3 que nous la dirigeons et contrôlons » . Il nous suggère pour le moins un important correctif à la conception intellectualiste. Sa mise en garde nous aidera à tracer une image plus véridique de l’interaction incessante entre notre effort conscient, visant ce que notre intellect nous dépeint comme réalisable, et l’impact des institutions, traditions et habitudes qui ensemble produisent souvent quelque chose de fort différent de ce que nous voulions obtenir.
Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
La connaissance consciente qui guide les actions de l’individu ne constitue, à deux importants égards, qu’une partie seulement des conditions qui lui permettront d’atteindre ses buts
Chapitre 2. Vertus créatrices d’une civilisation libre 1. Civilisation et croissance du savoir
Il y a d’abord le fait que l’esprit même de l’homme est un produit de la civilisation dans laquelle il a grandi, et qu’il ne se rend guère compte de la masse d’expériences qui a façonné cette civilisation – expérience qui vient en aide à l’esprit parce qu’elle s’intègre dans les habitudes, les conventions, le langage, et les convictions morales qui font partie de son maquillage. Ensuite, il faut prendre en compte que la connaissance qu’un esprit individuel manipule consciemment n’est qu’une faible partie de la connaissance qui à tout moment contribue au succès de son action. Quand nous réfléchissons au total des connaissances d’autres personnes qui conditionnent la réussite de nos efforts individuels, la dimension de notre ignorance des circonstances dont dépend notre réussite donne réellement le vertige.
Note
À rapprocher des externalités dont on n’a pas conscience
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Le grand problème est celui-ci : comment pouvons- nous tous profiter de cette connaissance, qui n’existe que dispersée dans les opinions distinctes, partielles et parfois opposées de tous les humains ?
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
Le passage du concept de liberté individuelle à celui de liberté-pouvoir a été facilité par la tradition philosophique qui a employé le mot « interdit » là où nous avons employé « coercition » dans notre définition de la liberté. Peut-être « interdit » serait à certains égards plus adéquat si on se rappelait toujours 16 que, dans son sens propre, ce terme implique l’action d’un agent humain vecteur d’interdiction . Dans cette perspective, le mot nous rappelle opportunément que les atteintes à la liberté consistent largement à empêcher des gens de faire des choses, tandis que « coercition » souligne qu’on les force à faire telle autre chose. L’un et l’autre aspect sont d’importance égale : pour être précis, nous devrions probablement définir la 17 liberté comme l’absence d’interdit et de coercition
Note
Définition de la liberté
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut » Ces deux confusions entre la liberté individuelle et d’autres concepts appelés liberté, sont moins dangereuses qu’une troisième, que nous avons déjà brièvement évoquée : la liberté entendue comme « la 14 possibilité physique de faire ce qui me plaît » , le pouvoir de satisfaire nos désirs, ou encore l’étendue des choix qui nous sont ouverts. Une « liberté » de ce genre apparaît dans les songes de nombre de gens, qui se figurent pouvoir voler, s’affranchir de la loi de gravité, être capables de se déplacer « libres comme l’oiseau » – ou bien pouvoir modifier les réalités environnantes selon leurs vœux. Cet emploi métaphorique du mot est usité depuis fort longtemps, mais jusqu’à une époque assez récente, peu de gens confondaient sérieusement cette annulation de tout obstacle à nos désirs, cette « liberté » qui serait une omnipotence, avec la liberté individuelle qu’un ordre social quelconque peut procurer. Ce n’est qu’à partir du moment où cette confusion de sens a été délibérément adoptée par son inclusion dans les thèses socialistes, qu’elle est devenue dangereuse. Une fois admise cette identification de la liberté avec le pouvoir, il n’y a plus de limite aux sophismes par lesquels les attraits du mot « liberté » peuvent être utilisés
Note
Confusion entre liberté et pouvoir
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
il n’est que trop facile en définissant la liberté de passer d’une définition en termes d’absence d’interdits à une définition en termes 18 19 d’absence de tous obstacles à la réalisation de nos aspirations , voire d’« absence de gêne extérieure » . Ce qui revient à interpréter celle-ci comme : pouvoir effectif de faire n’importe quoi qui nous convienne. Cette réinterprétation de la liberté est particulièrement lourde de menaces parce que son usage a pénétré profondément certains pays où, dans les faits, la liberté individuelle reste largement préservée. Aux États-Unis, elle s’est trouvée communément admise comme le fondement de la philosophie politique dominante des cercles dits « libéraux ».
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
L’utilisation explicite la plus ancienne du mot de liberté au sens de pouvoir se trouve, à ma connaissance, dans Voltaire, Le Philosophe ignorant, XIII, cité par B. de Jouvenel, De la souveraineté, Paris, 1955, p. 315 : « Être véritablement libre, c’est pouvoir. Quand je peux faire ce que je veux, voilà ma liberté ». Cette utilisation semble avoir été depuis lors étroitement associée à ce que nous devrons plus loin (chap. IV) appeler la tradition « rationaliste » ou française, de la liberté.
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
Cette nouvelle liberté n’est pour autant qu’un mot qui vient recouvrir l’exact opposé de tout ce que l’Europe a depuis toujours compris par le mot liberté… La nouvelle liberté qui est prêchée en Europe est le droit de la majorité à l’encontre de l’individu »
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
l’auteur observe, en approuvant, que « pour les économistes du National Resources Committee, la liberté économique n’est pas une question d’absence de contrainte sur les activités individuelles, c’est un problème de limitation et de direction collectives imposées aux individus et aux groupes aux fins que la sécurité des individus puisse être assurée ».
- Ce n’est pas « le pouvoir de faire ce qu’on veut »
Une définition par l’absence de contrainte, dans laquelle ce concept est souligné – telle celle donnée par E. S. Corwin, Liberty against Government, Bâton Rouge, Louisiana State University Press, 1948, p. 7 : « Liberté signifie absence de restrictions imposées par d’autres personnes à notre liberté de choix et d’action » – serait donc tout à fait acceptable.
- Ces deux concepts sont incommensurables
The Shorter Oxford English Dictionary, Oxford, 1933, donne pour première définition de to coerce (forcer) : « to constrain, or restrain by force, or by authority resting on force » (obliger, ou empêcher par la force, ou par autorité fondée sur la force).
- Ces deux concepts sont incommensurables
Commons et John Dewey ont répandu une idéologie dans laquelle « la liberté est pouvoir, pouvoir effectif 21 de faire des choses déterminées » et « réclamer la liberté, c’est réclamer le pouvoir » , alors que l’absence de coercition est seulement « la face négative de la liberté » et « n’a de valeur que comme moyen d’accéder à la 22 Liberté qui est pouvoir » . 5. Ces deux concepts sont incommensurables Confondre la liberté-pouvoir et la liberté au sens originel conduit inéluctablement à assimiler liberté 23 à richesse , et cela ouvre la possibilité d’exploiter toute la séduction que possède le mot de liberté à l’appui d’une exigence de redistribution de la richesse. Pourtant, bien que liberté et richesse soient, l’une et l’autre, de bonnes choses, et que souvent il nous faille avoir les deux pour nous procurer ce que nous désirons, elles n’en demeurent pas moins différentes
- Ces deux concepts sont incommensurables
Que je sois ou non mon propre maître et puisse suivre mon propre choix est une chose, et que les options qui me sont ouvertes soient nombreuses ou restreintes en est une autre, entièrement différente
- Ces deux concepts sont incommensurables
Le courtisan qui vit dans le giron de l’opulence, mais doit obéir au doigt et à l’œil au prince peut être moins libre qu’un pauvre paysan ou artisan, moins à même de vivre sa propre vie et de choisir ses propres occasions de se rendre utile
- Liberté et servitude
« Les libertés » n’apparaissent que si manque la liberté : ce sont des privilèges déterminés, des exemptions que des groupes ou des individus peuvent acquérir tandis que le reste est plus ou moins privé de liberté. Historiquement, le sentier de la liberté est passé par la constitution de franchises particulières. Mais que tel ou tel ait permission de faire telle ou telle chose n’est pas liberté, même si on peut appeler cela « une liberté » ;
- Liberté, coercition et droit
À l’évidence, un esclave ne peut devenir libre s’il n’obtient que le droit de vote, et aucun degré de « liberté intérieure » ne peut non plus faire de lui autre chose qu’un esclave – quelque effort qu’aient fait des philosophes idéalistes pour nous persuader du contraire. Aucun degré de luxe ou de confort, aucun pouvoir qu’il puisse avoir sur d’autres hommes, ou sur les ressources de la nature, ne peuvent non plus altérer sa dépendance à l’égard de la volonté de son maître. Si par contre il n’est soumis qu’aux mêmes lois que tous ses concitoyens, s’il est exempt de détention arbitraire et libre de choisir son travail, si enfin il lui est loisible de posséder et d’acquérir de la propriété, aucun autre homme ou groupe ne peut le forcer à lui obéir contre son gré.
Note
Qu’en est il de l’asymétrie de capital ? Car je suis obligé d’avoir un maître si je n’ai pas de capital
- Liberté, coercition et droit
Par coercition nous entendons le fait qu’une personne soit tributaire d’un environnement et de circonstances tellement contrôlés par une autre qu’elle est obligée, pour éviter un dommage plus grand, d’agir non pas en conformité avec son propre plan, mais au service des fins de l’autre personne. Dans cette situation où elle est forcée par une autre, la personne n’est plus à même de se servir de son intelligence et de sa connaissance ni de suivre ses propres objectifs ou croyances ; son autonomie se limite en fait à choisir le moindre mal. La coercition est un mal précisément parce qu’elle prive l’individu de sa qualité de personne susceptible de penser et déjuger, et le réduit au rang de simple instrument dans la poursuite des objectifs de quelqu’un d’autre.
- Liberté, coercition et droit
Toutefois, la coercition ne saurait être totalement évitée, dans la mesure où le seul moyen de 29 l’empêcher consiste à menacer de l’employer . La société libre s’est attaquée à ce problème en conférant le 30 monopole de l’emploi de la coercition à l’État , et en essayant de limiter ce pouvoir de l’État aux cas où il s’agit d’empêcher des particuliers d’en user. Pour que cela devienne possible, il faut que l’État protège des sphères reconnues comme privées, où les individus soient à l’abri d’immixtions d’autres personnes
- Liberté, coercition et droit
La coercition, dont les pouvoirs publics doivent disposer dans le but ainsi défini, se trouve réduite au minimum et rendue aussi peu dangereuse que possible par le fait qu’elle est enserrée dans des règles générales clairement connues. De la sorte, dans la plupart des cas un individu ne s’expose à la subir que s’il s’est mis lui-même dans une situation où il sait pertinemment qu’il la subira.
Note
Nul n’est sensé ignorer la loi
- Liberté, coercition et droit
Notre définition de la liberté dépend de la signification du concept de coercition
- Liberté, coercition et droit
Même là où la coercition ne peut être évitée, elle est débarrassée de ses conséquences les plus nuisibles en se trouvant réduite à des obligations limitées et prévisibles ou, au moins, indépendantes de la décision arbitraire de tiers.
Note
Si les lois étaient respectées parfaitement… Et qu’elles étaient parfaitement justes
Partie I – La valeur de la liberté
Dans une société en mouvement, toute restriction à la liberté réduit le nombre de choses qui sont essayées, et réduit donc le rythme du progrès.
Partie I – La valeur de la liberté
Dans une telle société, l’individu se voit accorder la liberté d’action non parce que celle-ci lui donne plus de satisfactions, mais parce que s’il est autorisé à suivre son chemin, il sera à même en moyenne de servir le reste d’entre nous mieux que s’il devait se conformer aux ordres que nous pourrions lui donner.
Note
La liberté individuelle moteur social
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
« civil » et « politique » dérivent l’un d’un mot latin, l’autre d’un mot grec, qui ont le même sens
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
Montesquieu, L’Esprit des Lois, XI, 2 (I, 149) : « Il n’est pas de mot qui se prête à plus de significations variées et qui ait fait des impressions plus diverses sur l’esprit des hommes, que celui de liberté. Certains l’ont pris comme un moyen de déposer une personne à qui on avait conféré une autorité tyrannique ; d’autres, pour le pouvoir de choisir un supérieur à qui on sera obligé d’obéir ; d’autres, pour le droit de porter des armes et d’être ainsi en mesure d’employer la violence ; d’autres enfin, pour le privilège d’être gouvernés par un natif de leur propre pays, ou par leurs propres lois ».
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
Liberté égale absence de coercition, est encore correcte… et de cette formule découle fondamentalement la totalité du système légal rationnel du monde civilisé
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
La mission d’une politique de liberté doit donc être de minimiser la coercition, ou ses effets dommageables, même si elle ne peut l’éliminer tout à fait.
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
Être un homme libre a toujours signifié la possibilité d’agir selon ses propres décisions et projets, par contraste avec la position de celui qui était irrévocablement assujetti à la volonté d’un autre, qui par décision arbitraire pouvait le contraindre à agir (ou ne pas agir) de façon déterminée
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
L’expression traditionnelle pour décrire cette liberté-là a souvent été : « indépendance par rapport à la volonté arbitraire d’un autre ».
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
Cette définition la plus ancienne de la liberté a souvent été traitée de vulgaire ; mais quand on observe toute la confusion que les philosophes ont engendrée quand ils ont essayé de l’affiner ou de l’améliorer, nous sommes en droit de l’accepter telle quelle
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
Dans cette acception, la liberté se réfère à une relation des hommes avec leurs semblables , et elle est violée seulement lorsque des hommes recourent à la coercition envers autrui. Cela signifie en particulier que l’étendue des possibilités matérielles entre lesquelles une personne a le choix à un moment donné n’a pas d’effet direct sur sa qualité de personne libre.
Chapitre 1. Liberté, libertés 1. La Liberté est absence de coercition
L’alpiniste en difficulté dans un passage où il ne voit qu’une seule manœuvre capable de lui sauver la vie est incontestablement libre, bien que nous ne dirions pas qu’il a le choix.
- Ce qui en distingue la « liberté politique »
The Meaning of Freedom » : Ethics, volume LU, 1941-42, p. 93 : « Si Robinson Crusoé tombe dans un puits, ou se trouve empêtré dans la végétation de la jungle, ce serait certainement user du mot de façon appropriée que de dire qu’il veut se libérer, ou retrouver sa liberté – et cela vaudrait aussi pour un animal ». Ce sens est incontestablement établi par l’usage aujourd’hui, mais renvoie à une conception de la liberté autre que l’absence de coercition, que défend le professeur Knight.
- Ce qui en distingue la « liberté politique »
La liberté implique donc que l’individu dispose de quelque sphère de décision privée, de quelques éléments de son environnement sur lesquels d’autres ne sauraient jouer.
Note
Est-ce vrai? Quand on voit la propagande… Que reste-t-il de privé
- Ce qui en distingue la « liberté politique »
ce qui est communément appelé « liberté politique », c’est-à-dire la participation des hommes au choix de leur gouvernement, au processus de la législation, et au contrôle de l’administration. Elle est une transposition de notre concept à des groupes d’hommes considérés comme un tout, qui leur donnerait une liberté collective. Mais un peuple libre en ce sens-là n’est pas nécessairement un peuple d’hommes libres ; et il n’est pas nécessaire non plus que quelqu’un ait part à cette liberté collective pour être libre individuellement. On peut difficilement prétendre que les habitants du District de Columbia, ou des étrangers résidant aux États-Unis, ou des mineurs qui n’ont pas droit de vote, 9 soient privés de leur pleine liberté personnelle – bien que ces personnes n’aient pas la liberté politique .
- Ce qui en distingue la « liberté politique »
L. de Lolme, The Constitution of England (nouvelle éd., Londres, 1800), p. 240 : « Concourir par son suffrage à édicter une loi, c’est avoir une part, quelle qu’elle puisse être, dans le pouvoir : vivre dans un État où les lois sont égales pour tous, et où on est sûr qu’elles sont appliquées… c’est être libre »
- Ce qui en distingue la « liberté intérieure »
Peut-être le fait que nous ayons vu des millions d’électeurs se placer dans la totale dépendance d’un tyran a-t-il fait comprendre à notre génération que choisir son propre gouvernement n’est pas forcément s’assurer la liberté.
- Ce qui en distingue la « liberté intérieure »
On donne un autre sens au mot « liberté » en lui adjoignant l’adjectif « intérieure »
- Ce qui en distingue la « liberté intérieure »
Le contraire de « liberté intérieure » dès lors n’est pas la coercition par autrui, mais l’influence excessive des émotions momentanées ou l’insuffisance d’énergie morale ou intellectuelle. Si une personne ne parvient pas à effectuer ce qu’elle a décidé de faire après mûre réflexion, si ses intentions ou sa force de caractère la désertent au moment décisif et qu’elle renonce à ce qu’elle continue à désirer malgré tout, nous pouvons dire qu’elle est « captive », ou « esclave de ses passions ».
- Ce qui en distingue la « liberté intérieure »
Qu’une personne soit ou non capable de choisir intelligemment entre des possibilités, et de s’y tenir une fois son choix fait, est un problème distinct de celui de savoir si d’autres gens lui imposeront ou non leur volonté. Les deux problèmes ne sont évidemment pas sans liaison : selon la force de caractère des acteurs, les circonstances qui pour certains constituent une coercition, ne seraient pour d’autres que des difficultés ordinaires à surmonter.